CHAPITRE 2

 

Le volontariat a toujours été de mise dans les rangs de l'armée;
si le patron exigeait de ses hommes l'impossible,
ceux-ci s'exécutaient sans renâcler...
Ils étaient prêts à suer sang et eau pour mourir:
Honneur et Gloire pour la Fédération Galactique était leur devise

 

Lobsang Mihre

"Pour la sueur et le sang"

 

 

MISSION

 

Les deux soleils du système dzêta Requin se lèvent derrière le disque obscur de la planète, éclairant de mille feux la carène du vaisseau. Je coupe l'alimentation générale du translateur et désactive les boucliers de protection.
- Nous sommes à destination les enfants... je crois déjà entendre la douce voix de notre chef résonner dans nos oreilles.
- Ouais! Je constate que tu es toujours aussi nul Michel, le Vieux va nous les casser comme d'habitude... pas vrai Bob?
- Ah! Ah! Et en prime nous serons désignés volontaires pour une mission bout-de-bois. Bon! Les deux soûlauds là, arriverez-vous à me passer les points de contrôle sans vous brouter? Je n'ai pas envie de retourner en tôle pour vos beaux yeux!
Je me souviens d'une rentrée de permission passablement houleuse... nous avions commencé par faire du rase-mottes sur quelques-uns des satellites de Xyzzy de la constellation du Djaj; une patrouille de Viper de la Police Galactique nous a pris aussitôt en chasse... un essaim de météorites nous a procuré un écran parfait et nous les avons semés. Puis, j'ai commis un autre impair en forçant la grille d'énergie qui ceinture la planète... en surface, dans la base, c'était l'effervescence. Après un double looping et un passage rapide très bas sur la tour de contrôle, j'ai fini ma course dans un hangar désaffecté. Bilan de l'opération: cinq semaines d'hôpital, la mise-à-pied trente jours et mon blocage momentané au grade de Major. Bob et Charles n'ont dû subir que des peines d'arrêts. Depuis lors, je n'ai jamais renouvelé ce genre d'exploit.
- Grille de sécurité en approche, annonçai-je dans le vidéocom, mise en phase...
- Rotation en cours, verrouillage de l'axe sur 9,13,2, énergisation en augmentation... Charles?
- Initialisation du code en route... reconnaissance... c'est bon, champ de force annulé... laissez glisser... c'est du gâteau.
Quelques gouttes de sueur perlent sur mon front, le couloir énergétique est étroit et ne laisse pas de place pour l'erreur. La tension monte d'un cran, au moindre pépin c'est la désintégration.
- La grille est en phase... séquence terminale engagée... ouf! On est passé!
- Pff... à chaque traversée de la barrière, je perds du poids... merci Michel!
- Je vous en prie les gars, c'était une vraie partie de plaisirs; je vous signale que nous sommes sous bonne escorte... le général Padwear est pressé de nous entretenir.
Sur le flanc droite du Sirius IV flotte la masse imposante d'un destroyer, sorte de monstre de l'espace, véritable cité volante où se côtoient quelques cinq mille individus de toutes races; comprenant deux rampes latérales d'accès dotées chacune de dix chasseur Pythons et capables d'accueillir plusieurs croiseurs dans leurs seins. Une puissance de feu inégalée dans toute la galaxie. Ces engins m'ont toujours fasciné et ce, depuis mon stage sur l'un d'eux pendant ma formation à l'Académie Militaire Lotanne.
- Contrôle Grille de Sirius IV ALPHA.74692.ECHO.93 comment me recevez-vous? énonçais-je distinctement.
- Sirius IV A.74692.E.93 ici le destroyer Victory id ALPHA.41366.CHARLY.72... je vous reçois cinq, veuillez vous positionner dans l'axe du traceur, transpondeur 5256, rappelez le contrôle pour le final.
- Contrôle Victory de Sirius 5256 bien reçu, j'ai priorité ALPHA-UNO. J'entame la procédure d'approche et rappelle dans la pente. Terminé.
La gueule béante de la rampe d'approche tribord s'ouvre devant nous. Place au gigantisme! Le balisage de la piste trace une ligne continue à l'infini. La syntonisation du bip du traceur se déroule automatiquement. Plusieurs navettes de liaison espace-sol attendent leur tour pour s'aligner, mon ordre de priorité me soustrait à toute cette réglementation rébarbative. La baie centrale occupe maintenant l'ensemble de mon champ de vision. Le Sirius IV s'engouffre et les parois défilent à grande vitesse.
- Contrôle Victory , 5256 dans la pente.
- 5256 compris, passez sur automatique, baissez les écrans et laissez faire l'opérateur.
Je m'étire dans mon siège, tend mes jambes et pose les pieds sur la console de navigation. J'étouffe un bâillement et me retourne vers mes camarades.
- Bob, dès que nous serons à quai, tu me dégottes une navette atmosphérique dans les plus brefs délais... je ne veux pas perdre de temps, le Vieux va assez râler.
- D'accord. Je laisse le soin à Charles de régler les formalités de passage...
- Rien à faire! articulais-je, nous avons ALPHA-UNO et nous devons nous en servir.
En temps normal, je n'aime guère user de passe-droits ou abuser de ma fonction. Mais dans le cas qui nous occupe, je ne me gène pas car j'ai la nette conviction que chaque minute est vitale. L'astronef a fortement ralenti et je peux observer les bouches adjacentes d'où jaillissent et pénètrent moult engins spatiaux.

Une légère secousse traverse le navire: nous sommes dans un berceau d'appontage. Le frottement typique des vérins appliquant la ventouse contre le sas d'accès se fait ouïr. Le chuintement de la pressurisation est audible jusque dans le poste de pilotage, et le gyrophare vire au vert lorsque l'atmosphérisation est en ordre.
- Ok les gars, allons-y!
Bob pianote le code d'ouverture sur le clavier mural. Une fois les battants ouverts, il y introduit les chiffres du dispositif de sécurité. Même en temps de paix, tout commandant de bord d'un astronef de la FIG doit protéger son bien contre une éventuelle ingérence étrangère en son sein. Il y a trois niveaux: le premier répercute l'effraction simple, sans aucune intervention du système de défense; le second transmet et neutralise l'indésirable; le troisième et dernier point éradique l'importun, puis communique à la direction centrale de la FIG un rapport succinct sur les modalités d'intervention du système de protection.
- Michel, je me rends au dispatching prendre les cartes d'embarquement. As-tu une préférence pour notre moyen de transport?
- Négatif! Pourvu qu'il soit disponible sur-le-champ! J'entends la voix du Vieux tinter à mes oreilles... Grouille-toi! S'il y a un problème, tu peux m'atteindre sur le réseau vidéocom interne.
- D'accord...
- Ah! Au fait, j'exige une navette exclusivement réservée à notre usage... Je ne veux pas partager un vol régulier! Tu nous rejoindras sur le pont d'envol, merci Bob!
Nous nous séparons dans la coursive principal et empruntons le couloirs menant aux cellules destinées aux navettes atmosphériques.

Les bourrasque déferlent sur les parois de la navette... même sale temps que sur Aruvar! La fenêtre d'entrée s'inscrit sur la grille du scanner. Ca y est, j'ai de nouveau la nausée! Je clique ma ceinture de sécurité car tout vibre. Les chiffres défilent sur mon écran et je quittance les différentes instructions émises par la tour du spatioport militaire de Lotan.
- Charles, nivelle le faisceau s'il-te-plaît... j'accroche le traceur dans quelques secondes...
- Ok Michel. Feux de gabarit enclenchés, nous sommes sur la pente, niveau 2,7,0.
- C'est noté merci... voilà! Transpondeur 3374, la voie est libre.
- Michel me lance Bob au travers du vidéocom, nous allons couper la route de deux trafics... attention aux remous!
- Vu! Je vais m'arrimer à la NORM98... dispositif engagé...
- Ce n'est pas un peu trop tôt comme manoeuvre?
- Je suis pressé Bob... ALPHA-UNO nous dispense de respecter la marche à suivre prescrite dans les manuels.
- Bien Michel! Moi ce que j'en dis... je ne voulais pas trop malmener vos petits estomacs malades c'est tout. Allons-y!
- Charles, ouverture et décompression de la soute.
- Ouverture en cours final... top! Déflecteurs coupés.
Une gigantesque claque vient nous tasser sur nos sièges, nous faisant encaisser en une fraction de seconde plusieurs fois notre poids. Ce type d'opération n'est utilisé qu'en cas d'extrême urgence... La conduite d'une navette soute ouverte, décompressée et sans déflecteurs est un exercice périlleux que seul un professionnel de la navigation de combat peut se permettre. La résultante de ces faits est de former une forte dépression ventrale qui a pour but d'aspirer le vaisseau vers le sol en le privant, par la même occasion, de toute sécurité extérieure.
Je retrouve mon souffle et contrôle mes paramètres.
- Ca fonctionne parfaitement les gars. Un peu secoué non? Bob, as-tu annoncé à la tour que nous prenions la NORM98?
- Affirmatif! Merci pour le décrochage... j'ai apprécié en connaisseur.
- Moi aussi, renchérit Charles, j'ai tout digéré d'une traite... Nous sommes à portée 1,0,1... je baisse le régime, le gyro sur 6,1,1.
L'arrimage doit se faire en douceur afin d'éviter tout accident. Je déverrouille les crans de sécurité et coupe l'alimentation du turbo. La stabilisation est impeccable... pas le moindre anicroche. Les bâtiments du spatioport se font plus précis. Toute la ville semble monter à notre rencontre à une vitesse vertigineuse.. L'immeuble de la FIG se démarque nettement du reste de la cité. Sur mon scanner clignote la surimpression de la porte NORM98... pas de place pour l'erreur. Je freine notre chute. D'un rapide coup d'oeil, je vérifie ma grille d'arrimage... tout baigne!
- Attention! annonçai-je dans le vidéocom. Je réenclenche les déflecteurs et repressurise la soute... top!
Une nouvelle fois, nos sièges anti-g gémissent sous l'absorption du choc. Le bras gourd, je bascule l'interrupteur de soute tout en paramètrant la mise en phase sur le clavier de mon scanner.
- Arrimage en cours, me lance Bob les yeux rivés sur son écran.
- Merci! On allonge le délai... dans vingt secondes... 15...10...7,6,5,4,3,2,1 contact! Propulsion coupée... Charles verrouillage?
- Ok! Contrôle Lotan, navette Victory 00963.YANKEE au sol, je déclenche le traceur.
- Bien reçu 00963.

A notre sortie du sas d'accès, un véhicule de service nous attend pour nous conduire auprès du Général. L'ascogravit est exigu et rapide.
- Que nous veut le Vieux? raille Charles.
- Laisse venir, soupirais-je. Pour qu'il aille nous chercher jusque sur Aruvar... il doit y avoir anguille sous roche et une sacrée mission à la clef.
Nous circulons à vive allure dans la mégalopole galactique, toute sirène hurlante. Notre chauffeur émérite se faufile allègrement dans la circulation dense de la cité. L'imposant building de notre corporation occupe la majeure partie de notre champ de vision; nous prenons rapidement de l'altitude afin d'atteindre l'entrée réservées aux officiers d'état-majors.
L'ascogravit s'arrête sur le toit de l'immeuble. Au dessus de la porte, l'indication FORCE D'INTERVENTION GALACTIQUE est apposée en lettres de feu. Passé cette dernière, une belle femme nous offre un large sourire auquel nous répondons tous en coeur.
- Bonjour Lorna!
- Bonjour Messieurs! Le patron vous attend impatiemment.
La parois principale s'efface. Nous pénétrons dans une pièce démesurée au fond de laquelle, sur une sorte de rectangle blanc, le général Padwear - Pop's pour les intimes - siège de manière crispée.
- Enfin vous voilà! vocifère-t-il en frappant rageusement la table du poing. Le budget qui m'est alloué ne me permet pas d'aller rechercher mes hommes dans les bas-fonds de la galaxie. Prenez place et écoutez! Comme vous le savez, nous n'avons jamais pu déterminer si les gens de la Ligue de la Subversion sont d'origine du Petit ou du Grand Nuage du Dragon... Récemment une gigantesque explosion a été enregistrée dans le Grand Nuage. De source sûre, nous avons appris qu'il s'agit d'un dépôt de quartzdium, satellisé dans les parages d'une ancienne supernova, qui a sauté. De plus, grâce à leurs stratèges, les Dragonniens ont obtenu le soutien du Comté d'Orkasis de la constellation du Triton, système gangrené par la corruption; créant ainsi une tête de pont permettant à leurs agents opérants de s'immiscer au coeur de la FedGal. Qui plus est, les forces de la Ligue en faction dans cette région mettent en danger la galaxie entière. A plusieurs reprises, nous avons dépêché des émissaires sans pour autant avoir obtenu de résultats concrets. La guerre fait rage aux alentours d'Orerve et les embuscades sont de plus en plus fréquentes. La trahison règne au sein de l'armée du général Edward. Par fortune, cette calamité épargne momentanément la FIG. Nous sommes au bord de la plus grave crise qu'ait jamais traversé la Fédération Galactique...
- Si vous me permettez mon Général, émettais-je d'une voix pâteuse, que venons-nous faire dans ce foutoir?
- Vous partez les trois en mission d'éradication totale. Vous avez carte blanche. Seuls quelques hauts responsables du Grand Etat-Major de Guerre de l'armée et de la FIG sont dans le secret!
- Des vacances quoi!!! me susurre Bob.
- On ne vous demande pas votre avis mais d'obéir! tonne le Vieux. Et maintenant, tenez vos ordres de marche et foutez-moi le camp avant que je ne change d'avis.
Nous voilà reparti, pensai-je. J'ai encore une sacrée gueule-de-bois mais Charles, lui, récupère comme de rien. Quant à Bob, il avait préféré rendre visite à des connaissances de passage sur Aruvar. Dans les couloirs de l'immeuble, les gens se retournent sur notre passage, seul Bob fait tache... je suis hirsute et ma tenue de vol est plus que fripée; Charles essaye de se refaire un semblant de contenance. Le temps de descendre à l'équipement, de signer la paperasse habituelle et de passer au hangar; nous embarquons sur la navette et réintégrons le destroyer Victory. Le Sirius IV nous amènera sur Zarece où nous prendrons possession de nos vaisseaux respectifs. Ce ne sont pas des engins de première fraîcheur mais, ils ont fait leurs preuves et puis... on s'attache à ces tas de tôles.

Nous réémergeons dans les proches parages de Nââm, dernière des sept planètes de l'étoile bêta de la constellation du Lygron.
Durant ces quelques sauts en hyperespace, nous avons passé notre temps à collecter toutes les données disponibles sur le comté d'Orkasis. Depuis la rupture des relations diplomatiques aucune information n'a filtré. Nous fonçons sur un objectif délicat. Pas de place pour l'erreur... notre ordre de mission est formel sur un point précis: peu importe les moyens engagés, seul le résultat compte!
Ma gueule-de-bois est loin derrière moi. Un délicat fumet flotte dans les coursives de l'astronef... Du point de vue culinaire, Bob est passé maître en la matière. Il faut dire qu'étant marié, il a un léger avantage sur Charles et moi-même. Ces repas détendent l'atmosphère un peu crispée de toute préparation à une mission de combat. Je descends au mess rejoindre mes camarades.
- Grouille-toi Michel avant qu'il n'y en ait plus! me lance jovialement Bob entre deux bouchées. Prends place! Je vous ai mijoté une friture de samak arrosée au lykme... un vrai régal.
- Merci Bob. Profitons-en car il se peut que cela soit notre dernier gueuleton avant longtemps.
Je pose le notepad au centre de la table.
- Voici les dernières nouvelles, commentais-je. Les Orkasiens viennent de lancer une nouvelle offensive dans le secteur zoulou,7,3. Nous possédons dans ce site une station-base: Antinéat; laquelle est un point vital dans notre système de défense. A priori, il semble que nos ennemis aient engagé trois flottes dans ce combat. Le rapport des forces Ligue/FedGal ne penche pas en notre faveur.
- Si je comprends bien Michel, souligne Charles en me versant un verre de lykme, nous devons nous rendre sur place, prendre la température et juger de la situation si précaire soit-elle.
- Tout-à-fait! Le commandant de la station est le colonel Pietre De Rongemault, une personne responsable comme l'indique son relevé de dossier personnel ci-joint, et très bon stratège... un peu sur l'âge mais parfaitement maître de lui. Bob?
- En effet, je lis que sa mutation récente est due à sa prochaine mise à la retraite. Pendant que j'y pense, j'ai ordonné une inspection générale du Milkyway et de l'Eridan. L'officier préposé à l'armement m'a assuré que tout serait prêt dans les délais impartis; équipage trié sur le volet.
- Ok les gars, c'est tout ce dont je désirais vous entretenir. Bon appétit et santé... à notre réussite!
Une fois repu, nous réintégrons nos places de travail. Je termine les dernières corrections de trajectoire orbitale d'approche pour notre présent but.

Zarece: Troisième planète du système; arsenal de la Fédération Galactique.
Deux escadrilles de la FIG sont basées en permanence dans cette portion de l'espace dont une effectue le quadrillage de la constellation; assurant la sécurité de ce point stratégique de la FedGal. Tous les navires personnels des agents opérants du contre-espionnage de la FIG y sont stationnés et leurs équipages consignés en caserne. Les principaux entrepôts de munitions de l'armée fédérée sont implantés sur Zarece ainsi que des camps d'entraînement à la guérilla et missions de commando; faisant de cet endroit un lieu que seuls les initiés sont habilités à pénétrer.
Le spatioport militaire de la base permet une automatisation complète de la procédure d'approche et d'atterrissage, concédant un gain de temps maximum par rapport à la procédure régulière. Bob s'engouffre par l'ouverture béante du silo réservé aux vaisseaux de surveillance. Les lourds battants blindés se referment sur notre passage. Les coursives latérales fourmillent du personnel de la base. Une légère secousse nous indique que nous sommes au sol. J'éteins le tableau des commandes générales et dégrafe mon filet de sécurité.
- As-tu remarqué toute cette agitation, me lance Charles en s'extirpant de son siège.
- Ouais, cela ne présage rien de bon. Tu viens Bob?
- J'arrive de suite... je boucle le livre de bord et je suis à vous.
- On y va déjà, gueulais-je à son intention.
Charles m'ayant devancé, j'enfile mon blouson, boucle mon ceinturon et descend dans la soute. Le sas latéral est béant et mon coéquipier m'attend sur le marchepied. Il pianote sur le clavier de la console murale de la passerelle de coupée.
- J'ai programmé le verrouillage de la marchandise... à moins que tu ne veuilles effectuer le transfert de suite?
- Négatif! Nous verrons tout ceci plus tard. De prime abord, réglons le problème des croiseurs.
Nous nous engageons dans les dédales souterrains du spatioport; Bob nous rejoint au pas de course, légèrement essoufflé...
- ... pff... Etes-vous passés au poste de contrôle?
- Point encore! Nous y allons de ce pas! rétorquais-je, sachant pertinemment où il voulait en venir.
- J'ai raflé ton notepad Michel... tu l'avais oublié sur la table du mess.
- Merci! Je...
- J'ai également découvert que tu avais bloqué TOUTE la cargaison! Pourquoi?
- Mmmh...
- Et mon lykme! Et mon samak par la même occasion!
- Je sais calme-toi! J'y reconsidérerai une fois que nous aurons nos badges et remplis toutes les formalités d'usages. Je ne tiens pas à ce qu'une patrouille de galcops (police galactique) nous arrête inutilement. Grouillons-nous maintenant!
Nous débouchons sur la zone de transit où toute personne souhaitant poursuivre a l'obligation de s'annoncer au poste de garde. Là, un planton bardé de décorations nous invite à décliner notre identité par reconnaissance vocale.
- Major Michel Lorrain, né le 17.08.1731PF à Suse/Nemrut, lieu de stationnement Zarece/Bêta Lygron, énonçais-je clairement dans le capteur acoustique... aucune fraude possible, ce système est le plus fiable. Quelques agents étrangers ont tenté de tromper la détection mais... sans résultat probant.
- Tout est en ordre Messieurs, notifie-t-il à notre encontre sur un ton monocorde, tout en nous remettant nos laissez-passer respectifs. Vous êtes habilités à librement circuler!

- Major Lorrain je présume? Capitaine Paul Murrat, responsable du site Oscar, énonça l'intéressé figé dans un garde-à-vous impeccable.
- Repos Capitaine! Avez-vous placé en alerte nos équipages comme ordonné par la commandant Fallow?
- Affirmatif! Veuillez me suivre s'il-vous-plaît! Vos croiseurs respectifs sont parés à décoller dans les plus brefs délais; votre priorité a été annoncée au centre de contrôle du trafic spatial et hyperspatial.
Nous sautons dans un transporteur léger afin de traverser le tarmac du silo central. Une vraie fourmilière... les ethnies se croisent sans heurts. Pas de divergences raciales car les compétences de chacun sont évaluées et exploitées au maximum de rendement.
- Capitaine, veillez à ce que la cargaison du Sirius IV soit transférées dans les plus brefs délais dans les soutes de l'Eridan.
- A vos ordres.
Paul Murrat s'exécute aussitôt et transmet mes desiderata au poste concerné. Nous nous arrêtons au pied d'une gigantesque bâtisse rectangulaire, dont les murs s'étendent à perte de vue.
- Voilà la hangar où sont entreposés vos astronefs. Veuillez me retourner vos coupe-file, vous n'en avez plus l'utilité. Vos cosmonefs et équipages sont stationnés aux emplacements OSC.47/49. Souhaitez-vous autre chose?
- Non merci Capitaine! Nous vous sommes gré de la promptitude à laquelle vous vous êtes acquitté de cette mission. Vous pouvez disposer!
- Que le Grand Architecte vous garde et protège la Fédération!
Après une rapide poignée de mains, le capitaine Murrat s'en retourne réintégrer le transporteur et rebrousse chemin.
Je me secoue mentalement. Levant mon regard vers le toit du hangar, j'aperçois la voûte étoilée de notre galaxie vers laquelle nous nous élancerons dans le but de délivrer la FedGal du joug de l'oppresseur.

J'observe l'alignement parfait des croiseurs de guerre fédérés. L'éclat de leurs carènes brillant de mille feux. A leur pied, une foule de gens se presse: transbordement de marchandises, réapprovisionnement en carburant, stock de l'armement à compléter, feuille de route à distribuer ainsi que les missions particulières à vérifier. Selon les ordres de services, le commandant de bord se doit d'être présent pour la procédure de mise en route. Il peut néanmoins déléguer un subalterne si les conditions du moment l'exigent.
D'un pas alerte, nous dirigeons vers nos engins respectifs: le Milkyway et l'Eridan. Ils nous ont été attribués lorsque nous avons rallier le service action de la FIG... Mon coeur bat plus vite dès que je les aperçois dans leur berceau d'appontement... OSC.47/49.
- Nous sommes à destination! signifiai-je à l'encontre de mes coéquipiers. On se retrouve à la limite du traceur... le premier attend l'autre.
- Ok Michel! Salut!
Je regarde mes compagnons s'éloigner vers l'Eridan. L'emblème de la FIG se détache nettement sur la proue de mon navire, tel un défi lancé à l'ennemi embusqué dans les confins de l'Univers. La rampe d'accès est abaissée le long du train d'atterrissage. A l'intérieur de la soute, j'imagine mes hommes d'équipage dans l'attente de mon arrivée... Il faut dire que lors de ma précédente mission, j'ai perdu la totalité de mes hommes dans un attentat dirigé contre la FedGal. Cette sombre affaire a été radiée de mon dossier personnel car aucune faute ne m'a été imputée. Mes gars étaient attelés à un délicat travail de déminage sur une grille d'énergie, un aviso de la FedGal assurait les liaisons entre les ateliers de l'armée et leur place de travail. Pour une raison inexpliquée, la petite embarcation a quitté sa route et est venue frapper de plein fouet mes hommes, les tuants sur le coup. L'explosion qui s'en suivit a fortement endommagé la grille et a perturbé la liaison avec la planète le mois durant. L'attentat a été revendiqué par la Ligue de la Subversion peu après.
Les mains dans les poches, je me remémore avec tristesse les moments passés avec leurs familles lors des funérailles officielles. Je respire un bon coup et grimpe l'échelle de coupée.
- Garde-à-vous! l'ordre sec et impératif résonne à mes oreilles et me ramène à la réalité. Major, lieutenant Verrat... Effectif complet, mise en soute terminée, Milkyway paré à appareiller!
- Repos Lieutenant! Présentez-moi les hommes s'il-vous-plaît!
- Astro Daniel Capet, spécialiste en cryptoliaisons et l'astro Michel Cehrillac, expert en hypernavigation.
- Bonjour Messieurs, bienvenue à bord du croiseur fédéré Milkyway. Comme indiqué sur votre ordre de marche, nous mettons le cap pour une destination ultra-secrète. Pour ce faire, il nous faudra traverser des contrées délicates et dangereuses... peut-être même devrons-nous user de moyens peu légaux. Vous connaissez par ouï-dire la priorité ALPHA-UNO... Celle-ci n'étant distribuée qu'en des cas bien déterminés où la sécurité de la FedGal en dépend. Dans le cadre de cette mission, nous possédons ce pouvoir discrétionnaire, cette carte-blanche qui est propre au service action de la FIG et enviée par l'armée fédérée...
- Vous voulez nous gonfler à bloc Major? Votre réputation n'est plus à faire... Ou que vous irez, nous foncerons avec vous, jusqu'en enfer s'il le faut!
De concert, les trois astronautes quittent leur rigidité militaire et avancent vers moi leurs mains tendues que je serre chaleureusement en voyant briller au fond de leurs yeux la flamme de la fierté.

Loin derrière nous, le disque obscure de Zarece se détache nettement sur le fond noir de l'espace. Nous naviguons, à vitesse subluminique, parallèlement au rayon du traceur. L'Eridan nous précède de cinq minutes... j'ai son transpondeur clairement inscrit sur l'écran de poursuite. Mon équipage vaque à ses occupations de manière très professionnelle. Je parcours attentivement mon notepad afin de bien m'imprégner de toutes les informations. La situation s'est envenimée depuis notre départ de Lotan... nous essuyons défaites sur défaites et nos pertes en hommes et astronefs sont catastrophiques.
- Lieutenant! Avisez le contrôle spatial que nous coupons le traceur et effectuons une translation d'urgence!
- A vos ordres!
Je fixe mon harnais de sécurité et pianote le code de l'Eridan sur une fréquence privée.
- Eridan de Milkyway...
- Reçu cinq Michel... Qu'y a-t-il pour ton service?
- Nous quittons le traceur et basculons en hyperespace immédiatement! La situation en zoulou,7,3 est des plus critique... A moins que tu n'aies une autre suggestion.
- Négatif pour nous! Je me décroche et translate, ciao!
Je romps la communication et prépare les modalités de transfert vers le secteur incriminé. Les coordonnées s'affichent sur le scanner... en avant!

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